La question est toujours la même : ou doit s’arrêter la
liberté d’expression. La récente ordonnance du tribunal
administratif de Toulouse rejette la requête en référé de l’AGRIF pour
l’interdiction du spectacle « Golgotha picnic » en s’appuyant justement
sur la défense de la liberté d’expression.
Certains diront qu’il
faut interdire l’expression qui provoque un vif sentiment d’agression
même lorsque la limite, pas toujours très claire, de la loi n’est pas
franchie avec des propos insultants, diffamatoires, incitant au meurtre
ou à la violence.
D’autres mettront en avant la liberté
d’expression telle que l’a définie la jurisprudence de la cour
européenne :
«La liberté d'expression vaut non seulement pour les
« informations » ou « idées » accueillies avec faveur ou considérées
comme inoffensives ou indifférentes, mais aussi pour celles qui
heurtent, choquent ou inquiètent : ainsi le veulent le pluralisme, la
tolérance et l'esprit d'ouverture sans lesquels, il n'est pas de
« société démocratique ». »
Une société qui ne
supporterait pas d’être choquée, blessée dans ses convictions serait à
l’extrême condamnée à la paralysie et deviendrait totalitaire. On ne
pourrait plus dire, par exemple, « Jésus est le fils de Dieu » un blasphème pour les
musulmans ; nous percevons les dérives de cette pensée totalitaire
lorsque certains points de vue sur l’homosexualité sont immédiatement
taxés d’homophobie et donc de discrimination condamnable.
Que
dire de la violence du propos de Rodrigo Garcia ; « une crucifixion
tragique et trash, [où] l’artiste démontre avec toutes ses armes que
l’iconographie chrétienne est pour lui l’image même de la terreur et de
la barbarie », le christ en croix est traité de « fou », de « chien
de pyromane » et «messie du sida», de «putain de diable». C’est tout
d’abord un triste témoignage de notre temps. Est-ce à l’égard des chrétiens une insulte, une
incitation à la haine ? On peut le penser. Est-ce l’expression d’une
relation douloureuse avec l’église ? C’est possible. L’art théâtral a
provoqué de vives réactions au cours de son histoire, je pense au
Tartuffe de Molière que l’on a voulu interdire en son temps. La
provocation peut aussi avoir une part de vérité en bousculant nos
habitudes « bien pensantes ». Jésus lui-même a provoqué en proclamant la
vérité, je pense à ses propos envers les pharisiens « serpents, race de
vipères » « Malheur à vous, scribes et pharisiens hypocrites! »
« Insensés et aveugles! »… Je ne dis pas que le propos de Rodrigo
Garcia et de Jésus sont de même nature, loin de là, mais qu’à la source
de ce geste théâtral violent, il peut y avoir une vérité que nous devons
regarder en face.
Ces représentations du « Golgotha
Picnic » remettent elles en question la foi des chrétiens, portent-elles
atteinte à la liberté de conscience ? Certainement pas. Peuvent-elles
avoir une influence dangereuse sur des spectateurs ? Néfaste sans doute,
la dérision et la violence ne favorisent pas le vivre ensemble dans un
dialogue paisible et constructif, mais je ne pense pas que cela soit
comparable à l’incitation à la haine et à la violence explicitement
contenue dans certaines chansons de hard rock ou de rap. Jésus est-il
offensé par un tel spectacle ? Ne pensez-vous pas qu’il a bien d’autres
sujets d’offenses visibles ou cachés !!! Et lorsqu’il a été insulté,
frappé, cloué à la croix il a eu ces mots « Père pardonne leur car ils
ne savent pas ce qu’ils font ». Est-ce que l’église frappée, insultée,
mise au pilori ne pourrait pas dire...
Mais je
m’insurge contre le raisonnement sectaire et contradictoire des
responsables culturels distribuant les subventions et établissant les
programmations car la plupart d’entre eux vont s’opposer au financement
et à la diffusion d’un spectacle faisant l’apologie du Christ sous
prétexte d’une défense de la laïcité, sans aucune considération
artistique, et ils sont à contrario
les preux défenseurs de l’expression anti chrétienne. La laïcité ne doit
pas être un épouvantail brandi pour censurer l’expression chrétienne et
masquer un laïcisme et un anticléricalisme militant ; la laïcité doit
être un espace de liberté pour tous.
La manifestation de
la foi n’est pas réservée à la sphère privée et la liberté d’expression
doit être partagée !
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